Et Que Vive la 7ème République !

  • Année de publication : 2023
  • Genres :
    Fiction
  • Nombre de page : 114 pages
  • Prix éditeur : 15,00 €
  • ISBN : 2494282276
  • Source : Amazon

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Les avis

Le 28 novembre, 2023 - 15:44

 

Thomas SEGUIN

 

 

 

 

Et Que Vive la 7ème République !

 

 

 

 

 

Éditions Il Est Midi

La fin d’un régime, mais de quel régime ?

Ce serait un argument facile et aisé que de personnaliser la situation politique en blâmant certains hommes politiques ou en accusant les partis politiques. Nous pourrions dénoncer la stagnation générale causée par les élites. Il y a de cela dans le contexte que nous vivons, mais pas seulement. En réalité, nous faisons face à une longue sédimentation, une très lente et agonisante fin de régime politique. Ou bien, et c’est la thèse de cet ouvrage, nous sommes passés à un autre régime politique sans même nous en rendre compte, ce qui est la cause de nombre d’incompréhensions sur ce que nous vivons. Nous pensions vivre sous un régime qui n'existe plus, et nous avons du mal à nommer la nouvelle situation politico-institutionnelle dans laquelle nous nous trouvons.

 

La crise de l'autorité politique dans notre pays, illustrée par la fin des mandats des deux présidents de la République (Sarkozy et Hollande) à des niveaux d'impopularité sans précédent, et on peut présager la même atmosphère pour la suite du mandat du Président actuel, témoigne de la crise institutionnelle résultant de l'inadaptation des formes constitutionnelles à notre époque. L'abstention électorale et le désintéressement politique grandissent au fur et à mesure que nous nous enlisons.

 

Chaque génération a le droit de définir son avenir, souvent à travers les institutions qu'elle met en place pour faire face aux défis du présent. Pour cela, il lui est essentiel de comprendre la nature particulière de son temps historique. Écrire une nouvelle Constitution est donc à la fois un acte identitaire fort pour affirmer un projet générationnel et un moyen de sortir de la situation périlleuse dans laquelle nous nous trouvons. Nous pouvons non seulement enregistrer les promesses d'un nouvel âge, mais aussi redéfinir les institutions adéquates, c’est-à-dire celles qui correspondent le mieux aux nouvelles mœurs et aux nouvelles conceptions du monde de notre époque.

 

Cependant, pour trouver des solutions effectives à moyen terme, il est essentiel de bien comprendre les problèmes. La bonne solution issue de la nouvelle Constitution dépend du diagnostic de la situation historique. Le problème de notre temps est peut-être que nous ne parvenons pas à trancher sur notre situation ; nous sommes peut-être dans une zone imperceptible où l'histoire n'a plus de sens car elle n'a plus de forme, ou plutôt elle n'a plus l'enveloppe qui lui donne forme. Comme les générations précédentes, nous devons surmonter les crises politiques, sociales et économiques qui se présentent à nous. Nous devons inscrire dans la pierre la nouvelle conception anthropologico-politique qui est la nôtre, dans la dimension universelle qui est notre destin sur la scène mondiale.

Je ne décrirai pas les grandes lignes précises et prédéterminées de l'architecture complète du nouveau projet constitutionnel. Je discuterai plutôt des évolutions qui doivent être prises en compte dans la philosophie politique du projet constitutionnel. Un projet aussi complexe doit être le résultat d'un processus engageant toutes les composantes du peuple.

Il est incontestable qu'un projet d'une telle complexité doit être le fruit d'un processus impliquant la totalité du peuple, toutes ses composantes. Les intellectuels devraient s'en emparer également, afin de définir dans leurs sphères respectives les priorités les plus éthiques, et d'élever l'humanité vers une conception plus élevée d'elle-même.

Cette nouvelle constitution ne peut être conservatrice et réactionnaire, elle se doit de porter le pays vers le progrès social, politique, économique qui a toujours été la lumière qui l’a guidé. 

La définition de la démocratie ne doit comporter aucune limite, car il s'agit de continuellement élargir ses horizons. Il est impossible de circonscrire l'utopie démocratique aux pratiques actuelles de notre cadre formel, car l'indécidabilité sur la définition des pratiques démocratiques est une caractéristique inhérente à la démocratie.

Comme l'a expliqué Derrida, la singularité de la démocratie est conditionnée par la reconnaissance d'une inadéquation à son modèle, une caractéristique qui ne se trouve pas dans l'essence des autres régimes. En conséquence, on ne peut limiter le concept de démocratie à ce que nous connaissons aujourd’hui ; être démocrate consiste justement à s'interroger constamment sur l'origine, les fondements et les limites de notre propre appareil conceptuel. Être démocrate, c’est vouloir faire avancer la démocratie vers une définition toujours plus haute d’elle-même.

La notion de régime politique englobe bien plus que de simples institutions. Il est souvent erroné de considérer seulement le cadre constitutionnel sans analyser les mœurs politiques.

Les institutions sont en effet animées par et pour une culture politique. Par conséquent, un régime politique concerne l'ensemble des institutions et des pratiques caractérisant un mode d'organisation de l'État et de la société.

Il convient également de prendre en compte la manière dont la société est organisée, car les modes de pouvoir ou les modalités d'organisation institutionnelle du pouvoir sont également visibles dans la culture.

 

Les temps sont assurément difficiles pour la 5ème République, mais les observateurs se trompent en la croyant encore existante. Elle est déjà morte, enterrée avec la génération des quinquagénaires qui l'a vue naître en 1958. De manière graduelle, insidieuse mais inexorable, les institutions ont évolué en quelque chose de différent de ce qu’elles ont été initialement, de sorte que cette constitution ne nous permet plus de résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés et de répondre à l'esprit du temps qui a changé.

 

La 5ème République est morte car nous vivons à bien des égards sous un régime d'exception qui menace notre esprit démocratique et l'essence même du contrat social. Nous vivons donc sous la 6ème République, et les historiens du droit constitutionnel ou des régimes politiques qui étudieront notre période dans plusieurs décennies auront sans doute suffisamment de recul pour décrypter les décisions et évolutions marquant ce changement, les moments de rupture qui ont fait que ce régime politique n’est plus celui de 1958.

Or, nous le savons, vivre dans un régime inadapté à notre situation, incapable de répondre à nos problèmes, menace notre vivre-ensemble. Sans changement notable, il est possible que le pouvoir se crispe, concentre et réprime, que les mentalités collectives républicaines et démocratique s’affaissent en attendant l’autoritarisme. Nous constatons déjà que la France est à la croisée d’un chemin, sur les rebords de l’illibéralisme. Si la 5ième République est morte, et que nous sommes sous une 6ième République viciée qui ne porte pas son nom, je proclame alors : « Et que Vive la 7ième République ! ».

 

 

 

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A propos de l'auteur
Thomas SEGUIN
Thomas Seguin, né le 21 avril 1980, est un sociologue français.

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