Les mots de l'indicible

Quand les écrivains parlent du deuil d'un enfant

Le deuil est toujours un thème difficile à aborder en littérature, et encore plus s’il concerne un enfant. Dans ce cas, la littérature est plus qu’une thérapie pour son auteur. Elle devient un outil de réflexion sur sa fonction, sur sa capacité à redonner la vie. Notre sélection de livres récents qui abordent ce thème ô combien douloureux sans oublier Victor Hugo, celui qui fut l'un des premiers à évoquer le désespoir d'un père à la mort de sa fille Léopoldine.

Pour un parent en deuil, écrire est un moyen de dire ce qui n’était peut-être pas possible d’exprimer avant, de faire son deuil. Voici quelques livres qui relatent la mort d’un enfant, chacun à leur manière. 

Marie Laberge, « Ceux qui restent » (Editions Martha Inc./ Stock)

Le propos : Combien de gens sont touchés, atteints en plein cœur quand quelqu’un se suicide ? Combien de blessures sont infligées à ceux qui restent? Personne n’en sort indemne. Charlène, Vincent, Mélanie, Stéphane, Muguette… tous brisés, freinés dans leur vitalité par la mort brutale de Sylvain. Chacun réagit à sa façon. Chacun se bat comme il peut, avec les armes dont il dispose. La violence du geste suicidaire se répercute longtemps dans leur existence. Mais la vie est forte. 

Le plus : Roman d’action empreint d’émotion, de réflexions sur la vie, roman d’une profonde humanité, Ceux qui restent fait entendre des personnages puissants et attachants. Malgré la dureté des faits évoqués, ce roman est avant tout centré sur ceux dont on parle si peu et qu’on laisse seuls devant l’innommable et l’insupportable. Depuis quarante ans, la canadienne Marie Laberge sonde les profondeurs de l’âme humaine.

Anna McPartlin, « Les derniers jours de Rabbit Hayes » (Editions du Cherche-Midi)

Le propos : Quand Mia, surnommée affectueusement Rabbit, entre en maison de repos, elle n’a plus que neuf jours à vivre. Tous ses proches sont présents à ses côtés pour la soutenir. Jack et Molly, ses parents, incapables de dire adieu à leur enfant, Davey et Grace, son frère et sa sœur, qui la considèrent toujours comme la petite dernière de la famille, Juliet, sa fille de 12 ans qu’elle élève seule, et enfin Marjorie, sa meilleure amie et confidente. Au fur et à mesure que les jours passent et que l’espoir de la sauver s’amenuise, sa famille et ses amis sont amenés à s’interroger sur leur vie et la manière dont ils vont continuer sans celle qui leur apporte tant. Car, si Rabbit a elle-même perdu la bataille, celle-ci ne fait que commencer pour son entourage.

Le plus : Anna McPartlin nous fait partager ces neuf journées si spéciales dans la vie de Rabbit et de ses proches. Mélancolique et drolatique à la fois, Les Derniers Jours de Rabbit Hayes nous entraîne dans un voyage émotionnel intense. À travers une galerie de personnages touchants, ce récit sur le deuil déborde d’un optimisme rare.

Sophie Daull, « Camille mon envolée » (Philippe Rey)

Le propos : Dans les semaines qui ont suivi la mort de sa fille Camille, 16 ans, emportée une veille de Noël après quatre jours d’une fièvre sidérante, Sophie Daull a commencé à écrire. Écrire pour ne pas oublier Camille, son regard « franc, droit, lumineux », les moments de complicité, les engueulades, les fous rires ; l’après, le vide, l’organisation des adieux, les ados qu’il faut consoler, les autres dont les gestes apaisent... 

Le plus : Comédienne d’origine, « Camille mon envolée » est le premier roman de Sophie Daull. Outre le thème tragique qu’est la perte d’un enfant, Sophie Daull emmène son lecteur dans le combat d’une mère qui tente de se reconstruire… son combat. Pourtant elle ne tombe pas dans le mélodramatique, son livre devient l’endroit qu’elle partage avec sa fille, sa fille et ses lecteurs.

Philippe Delaroche, « La gloire d’Inès » (Stock)

Le propos : Inès, la fille de l’auteur, a péri dans un incendie en plein Paris. Sept ans plus tard, Philippe Delaroche décide de prendre la plume pour faire mémoire de la jeune fille qu’elle était, de « reprendre la conversation que sa mort n’a pas interrompue ». L’écrivain décrit cet évènement comme n’étant pas l’évènement capital, mais qui lui ait été donné de la voir naître, exister, s’exprimer, et qu’en la glorifiant finisse par filtrer le sentiment mystérieux de sa présence.

Le plus: Après deux romans et le Dictionnaire de l’adolescence, le journaliste et écrivain s’illustre avec un livre plein d’émotion. L’auteur puise dans l'art, la philosophie, la littérature afin d'évoquer son deuil et la personnalité de sa fille, décédée dans un incendie en 2009.

Didier Pourquery, « L’été d’Agathe » (Grasset)

Le propos : Le 10 août 2007, la jeune Agathe s’éteignait, après toute une vie à combattre la mucoviscidose. Son père, le journaliste Didier Pourquery, remémore sa vie, pleine de rires et d’inquiétudes mais aussi d’espoir. Agathe était drôle et curieuse, et c’est ce que son père veut retranscrire à travers ce livre. 

Le plus : Didier Pourquery nous livre un récit loin d’être étouffant, et qui se veut, au contraire, une ode à la vie. En se replongeant dans ses notes, photos, lettres, l’écrivain parle de la vie de sa fille mais surtout de la vie en général. Un récit fort, sans pathos, qui tient le lecteur jusqu’au dernier mot. 

 

Thierry Consigny, « La Mort de Lara » (Flammarion)

Le propos : La Mort de Lara est un récit autobiographique relatant la mort accidentelle de la fille de l’auteur. Lara a quatre ans lorsqu’elle se noie, presque sous les yeux de son père. Elle tombe dans la piscine alors qu’elle ne sait pas nager. Toute la famille est là, et pourtant personne n’a rien vu, rien entendu. 

Le plus : Thierry Consigny parvient à raconter la mort de sa fille avec une bouleversante sobriété, loin de la plainte et du pathos. Le récit est d’autant pus poignant qu’il est emprunt de pudeur. L’ouvrage qui relate un évènement tragique parvient à rester tourné vers la vie. Un premier roman réussi pour cet ancien élève de l’ENA. 

Victor Hugo, « Les Contemplations »

Le propos : Ce recueil de poésie, qui fait partie des oeuvres les plus connues de Hugo, est avant tout un recueil de la nostalgie, en particulier du souvenir de Léopoldine, la fille du poète, qui meut noyée dans la Sein en 1843. Hugo choisit les vers pour raconter la traversée de son deuil, mettre en forme cette expérience douloureuse, et peut-être même la surmonter. Il s’adresse à sa fille et aux autres, s’interrogeant sur la volonté de Dieu. 

Incontournable : Victor Hugo choisit un style simple pour évoquer la mort de sa fille, rejetant le pathos. D’ailleurs, il a recours a un double pour parler de ses propres souffrances, comme s’il parlait d’un autre. Les Contemplations sont une référence de poésie et de sobriété. 

 

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