Tristan et Iseut

Extrait de Tristan et Iseut

Mon Dieu, murmura-t-il, est-ce possible ? Mes yeux ne me mentent pas. Seigneur! Je ne sais que faire : les tuer ou partir ? Il y a longtemps qu'ils vivent en forêt. J'ai raisonnablement toutes les raisons de croire que s'ils s'aimaient d'amour insensé, ils seraient nus. Et il n'y aurait pas cette épée entre eux. Ils se comporteraient autrement. Je voulais leur mort : je ne les toucherai pas et renonce à ma colère.

Ils n'ont souci de fol amour. Je ne les frapperai pas : ils dorment. Si je faisais le moindre geste brutal,  je serais gravement coupable, et si j'éveille cet homme assoupi et que l'un de nous tue l'autre, ce sera bien triste rencontre. Je leur laisserai des indices pour qu'à leur réveil, ils sachent bien qu'on les a découverts alors qu'ils sommeillaient et qu'on a eu pitié d'eux : je ne veux pas qu'ils périssent ni de ma main ni par la faute d'un de mes hommes. Je vois au doigt de la reine une émeraude. C'est moi qui la lui ai donnée : elle est magnifique. J'ai moi-même une bague qui vient d'elle. Je vais lui retirer son anneau. Je prendrai aussi les gants de vair qu'elle m'apporta d'Irlande. Ils serviront d'écran au rayon qui flamboie sur son visage et qui l'indispose, et, au moment de partir, je déroberai l'épée qui les sépare et par laquelle le Morholt  fut décapité. »

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