Propos sur le bonheur

Propos sur le bonheur

Le bonheur est beau à voir; c’est le plus beau spectacle. Quoi de plus beau qu’un enfant ? Mais aussi il se met tout à ses jeux; il n’attend pas que l’on joue pour lui. Il est vrai que l’enfant boudeur nous offre l’autre visage, celui qui refuse toute joie; et heureusement l’enfance oublie vite; mais chacun  a pu connaître de grands enfants qui n’ont point cesser de bouder. Que leurs raisons soient fortes, je le sais; il est toujours difficile d’être heureux; c’est un combat contre beaucoup d’événements et beaucoup d’hommes; il se peut que l’on y soit vaincu; il y a sans doute des événements insurmontables et des malheurs plus forts que l’apprenti stoïcien; mais c’est le devoir le plus clair peut-être de ne point se dire vaincu avant d’avoir lutté de toutes ses forces. Et surtout, ce qui me paraît évident, c’est qu’il est impossible que l’on soit heureux si l’on ne veut pas l’être ; il faut donc vouloir son bonheur et le faire.

Ce que l’on a point assez dit, c’est que c’est aussi un devoir aussi envers les autres que d’être heureux.On dit bien qu’il n’y a d’aimé que celui qui est heureux; mais on oublie que cette récompense est juste et méritée; car le malheur, l’ennui, et le désespoir sont dans l’air que nous respirons tous; aussi nous devons reconnaissance et couronne d’athlète à ceux qui digèrent les miasmes, et purifient en quelque sorte la commune vie par leur énergique exemple. Aussi n’y a t-il rien de plus profond dans l’amour que le serment d’être heureux. Quoi de plus difficile à surmonter que l’ennui, la tristesse ou le malheur de ce que l’on aime ? Tout  homme et toute femme devraient penser continuellement à ceci que le bonheur, j’entends celui que l’on conquiert pour soi, est l’offrande la plus belle et la plus généreuse. »

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