Marie Nimier et les métamorphoses d'une grotte

Marie Nimier n'est pas seulement "une fille de". Elle est l'auteure d’une douzaine de romans traduits dans le monde entier, dont certains lui ont valu des prix comme Sirène (1985) qui a été couronné par l’Académie Française et la Société des Gens de Lettres. Son livre Domino lui a permis de remporter le prix Printemps du Roman. La Reine du Silence s’est vu décerné le Prix Médicis en 2004 et Les Inséparables : le Prix Georges Brassens et le Prix des Lycéens d’Evreux. Elle écrit aussi des chants. Marie Nimier est revenue en ce début d’année avec un livre poétique intitulé La Plage.

Après son livre Je suis un homme, Marie Nimier offre à travers son nouveau roman une subtile histoire autour de l’amour et la complicité. Ode à la nature et à la poésie, La Plage, paraît plus une intrigue policière qu’un récit émotif sait intriguer ses lecteurs en jouant avec la frontière entre le rêve et le réel. Un texte qui se lit comme une expérience sensorielle.

Le mystère des personnages

L’héroïne, appelée "L'inconnue" ou encore "La jeune femme" demeure mystérieuse tout au long de l'oeuvre. Très peu décrite, son passé résumé en quelques anecdotes et un comportement très discret enveloppe le mystère autour de ce personnage qui laisse transparaître un caractère très distant et tourmenté. On apprend plus tard que la destination de la jeune femme n'est pas anodine : c'est sur cette plage (et particulièrement dans cette grotte) que le personnage s'était rendue deux ans auparavant accompagné d'un homme tout autant mystérieux que le reste des protagonistes. 

Un voyage métamorphosant

 La jeune femme se rend seule et presque sans affaires sur cette plage car « elle veut laisser l'avenir derrière elle ». Cette phrase prend une tournure ambivalete lorsque le lecteur comprend que l'héroïne se rend sur les lieux pour se remémorer d'anciens souvenirs passés avec son ancien compagnon. Entre nostalgie et nécessité de s'extirper des griffes de son passé, elle entame  ce voyage pour se remettre de la solitude causée par l'un des seuls éléments de son passé que l'auteure porte à notre connaissance, la perte des liens qu'elle entretenait avec sa figure paternelle.

L'ombre du husssard

Cette figure souvennt évoquée, directement ou indirectement par la romancière dans ses livres, comme une empreinte indélébile, qui résonne avec celle de son véritable père.  Roger Nimier est mort prématurément laissant à jamais sa fille "inconsolée". La petite Marie devenue écrivain à son tour tisse souvent avec ses mots un fil d'Ariane avec celui qu'elle ne retrouve plus que dans l'écriture. Dans La plage, l'ombre du hussard flotte subrepticement, dans cette grotte fondatrice.

Le colosse et la petite

Lorsqu'elle retrouve la grotte de ses souvenirs, elle se rend compte qu'elle n'est plus déserte. Intriguée par les occupants, L'inconnue reste tapis dans l'ombre tel un animal effrayé à les épier pendant plusieurs jours jusqu'à ce qu'elle se fasse remarquer en tentant de voler une orange. C'est à ce moment que Marie Nimier dévoile la virtuosité de sa plume grâce à son style et l'expérience fulgurante dont elle fait preuve : elle révèle le jeu de sensualité et de découverte autour des trois personnages. Evasifs et méfiants au premier abord, les habitants de la grotte vont vite éprouver d'autres sentiments : attirance, admiration ... Le livre se termine sur une note intriguante, une envolée qui est propre au style de Marie Nimier, qui aime laisser le lecteur en proie à ses propres doutes et interrogations. 

> La Plage, Marie Nimier (Editions Gallimard), 14 euros. 

Regardez aussi l'interview de Marie Nimier dans La Grande Librairie : 

Découvrez un extrait de La Plage :