Prix Médicis

Ivan Jablonka, Steve Sem-Sandberg et Jacques Henric lauréats

Les jurés du prix Médicis ont choisi de récompenser Ivan Jablonka dans la catégorie roman français, Steve Sem-Sandberg  pour le Médicis étranger et Jacques Henric pour le Médicis essai. Les lauréats succèdent à Nathalie Azoulai,  Hakan Günday et Nicole Lapierre.

Revenons sur ces œuvres qui ont plu aux jurés du prix Médicis : Laëtitia ou la fin des hommes par Ivan Jablonka, Les élus par Steve Sem-Sandberg et Boxe par Jacques Henric.

Laëtitia ou la fin des hommes par Ivan Jablonka (Seuil)

L'auteur: Né à Paris en 1973, Ivan Jablonka est un historien, éditeur et auteur. Ancien élève de l'École normale supérieure il est professeur d’histoire à l’université Paris 13. Depuis 2009, il codirige avec Pierre Rosanvallon la collection La République des Idées (éditions du Seuil), où il a édité des ouvrages de sociologues et d'économistes notamment comme Thomas Piketty. Sa démarche d'écrivain s'appuie sur un travail minutieux d'historien, à la recherche de témoignages et d'archives. Pour "Histoire des grands-parents que je n'ai pas eus", il a reçu le prix du Sénat du Livre d'histoire 2012, le prix Guizot 2012 de l'Académie française.

L'histoire: Dans la nuit du 18 au 19 janvier 2011, Laëtitia Perrais a été enlevée à 50 mètres de chez elle, avant d’être poignardée et étranglée. Il a fallu des semaines pour retrouver son corps. Elle avait 18 ans. Ce fait divers s’est transformé en affaire d’État : Nicolas Sarkozy, alors président de la République, a reproché aux juges de ne pas avoir assuré le suivi du « présumé coupable », précipitant 8 000 magistrats dans la rue. Mais Laëtitia Perrais n'est pas un fait divers. Pendant deux ans, Ivan Jablonka a rencontré les proches de la jeune fille, sa soeur jumelle, ses parents, ses amis, les responsables des services sociaux, ainsi que l'ensemble des acteurs de l'enquête, gendarmes, juges d'instruction, procureurs, avocats et journalistes, avant d'assister au procès du meurtrier, en octobre 2015. De cette manière, Ivan Jablonka a pu reconstituer l'histoire de Laëtitia. Il a étudié le fait divers comme un objet d'histoire, et la vie de Laëtitia comme un fait social. Car, dès sa plus jeune enfance, Laëtitia a été maltraitée, accoutumée à vivre dans la peur, et ce parcours de violences éclaire à la fois sa fin tragique et notre société tout entière : un monde où les femmes se font harceler, frapper, violer, tuer.

Pourquoi il a été choisi ? Lorsqu'on apprend le sujet du livre d'Ivan Jablonka, on pense encore une fois aux faits divers que l'on retrouve habituellement en sujet principal d'un roman, mais ici le livre va beaucoup plus loin. Il ne s'agit pas d'un simple récit linéaire ou d'une simple enquête, c'est plus que ça, ce roman est de la vraie littérature. Dans son livre, l'auteur rend justice à tous ces enfants martyrisés, battus et maltraités en leurs redonnant une place dans notre société. Ivan Jablonka cherche également à condamner les actes machistes et accuse les nombreux prédateurs de cette affaire, le père biologique, le père d'accueil mais aussi le président de la république de l'époque, Nicolas Sarkozy. Ce qu'a créé Ivan Jablonka n'est pas seulement une œuvre sociologique et politique, c'est une œuvre qui apporte de l'empathie et de la compassion pour ces nombreuses jeunes filles qui ont vécu ou vivront le destin tragique de Laetitia. Un livre qui fait bouger les frontières entre l'Histoire, le journalisme et le roman.

Les élus par Steve Sem-Sandberg (Robert Laffont)

L’auteur :  Né en 1958, Steve Sem-Sandberg  est un journaliste, romancier et traducteur suédois. Il a commencé sa carrière de romancier en 1976 avec deux récits de science-fiction : Sländornas värld et Sökare i dödsskuggan. Il a reçu le prix Dobloug en 2005. Son roman De fattiga i Łódź traduit en français sous le titre Les Dépossédés est une fiction datant de 2009 qui a reçu le prix littéraire suédois Augustpriset. Ce roman, publié chez Robert Laffont en 2011, traite du personnage de Chaim Mordechai Rumkosvki et la vie dans le ghetto de Łódź pendant la Seconde Guerre mondiale.

L'histoire : " Maintenant, Julius a les ciseaux. Pourtant la douleur est toujours là. Schwester Mutsch aussi est toujours là. Elle se penche vers lui et lui crache à la figure, puis elle étale la salive sur les lèvres et les paupières fermées du garçon. Espèce d'ordure. Tu n'as aucun droit de vivre. Soit on t'enferme chez les fous, soit le docteur te fait une piqûre. Et voilà que la paire de ciseaux ne se trouve plus dans sa main. Elle flotte dans la lumière bleutée, au milieu des lits et des tables de chevet. Alors il brandit haut l'instrument et l'enfonce dans sa poitrine. Enfin, le silence se fait. Même la lumière bleutée semble s'être éteinte. Puis elle revient. Et avec elle, l'insoutenable douleur. " En 1941, à Vienne, l'hôpital du Spiegelgrund a été transformé par les nazis en un centre pour enfants handicapés et jeunes délinquants. Jour après jour, Adrian, Hannes et Julius, pensionnaires de la maison de redressement, tentent d'exorciser l'horreur. Dans un époustouflant ballet de voix tour à tour intérieures et extérieures, ils racontent l'enfer qu'ils vivent et la mort qui les guette au pavillon 15, où l'on extermine les " indésirables ".

Pourquoi il a été choisi ? Comme son livre précédant « Les dépossédés », « Les élus » est un livre polyphonique, situé entre l’histoire et la fiction. Steve Sem-Sandberg nous conduit auprès de ces enfants sacrifiés par l’idéologie du nazisme pour conserver la race aryenne. Ce roman très fort s’appuie sur un travail documentaire approfondi et rigoureux. A travers le brillant travail d'écriture, l'auteur nous fait vivre l'histoire de ces personnages et témoigne de l’atrocité des traitements qu’ils ont subis. Ce livre bouleversant est à lire pour ne pas oublier. Nul ne sortira indemne de la lecture de ce livre qui honore la mémoire des enfants torturés  pendant la Seconde Guerre mondiale.

Boxe par Jacques Henric (Seuil)

L’auteur : Né en 1958, Steve Sem-Sandberg  est un journaliste, romancier et traducteur suédois. Il a commencé sa carrière de romancier en 1976 avec deux récits de science-fiction : Sländornas värld et Sökare i dödsskuggan. Il a reçu le prix Dobloug en 2005. Son roman De fattiga i Łódź traduit en français sous le titre Les Dépossédés est une fiction datant de 2009 qui a reçu le prix littéraire suédois Augustpriset. Ce roman, publié chez Robert Laffont en 2011, traite du personnage de Chaim Mordechai Rumkosvki et la vie dans le ghetto de Łódź pendant la Seconde Guerre mondiale.Né en 1938 à Paris, Jacques Henric est un critique, essayiste et romancier français. De 1954 à 1959 il suit successivement les cours de l'École normale d'instituteurs de Chalons-sur-Marne, puis ceux de la Faculté des lettres de l'université de Dijon. Après avoir été enseignant pendant dix ans, il a collaboré à divers journaux et revues comme Les Lettres françaises, dirigé par Aragon, et Tel Quel où il publie ses premiers romans. Il est aujourd’hui membre du comité de rédaction d’Art Press que dirige Catherine Millet avec laquelle il est marié depuis 1991.

L'histoire: Boxe est né de la rencontre de Jacques Henric avec le boxeur français d'origine guadeloupéenne Jean-Marc Mormeck. Plusieurs fois champion du monde dans la catégorie lourds-légers, celui-ci souhaitait remettre en jeu son titre dans la ville de Kinshasa, là où se déroula en 1974 le "match du siècle", Ali contre Foreman. L'écrivain devait l'accompagner en vue de produire le récit de ce combat, mais le projet échoue. Jacques Henric se lance alors dans l'écriture d'un livre sur la vie et les combats des grands pugilistes de l'histoire de la boxe, Georges Carpentier, Al Brown, Marcel Cerdan, Ray Sugar Robinson, Mohamed Ali, Sony Liston, Jake la Motta, Carlos Monzon, Mike Tyson, beaucoup d'autres, et bien sûr, Jean-Marc Mormeck. Sa passion pour ce sport, qui est plus qu'un sport, conduit alors Jacques Henric à revenir sur les événements marquants de son enfance et de son adolescence.

Pourquoi il a été choisi ? « Boxe » est un livre passionnant. Discrètement sorti lors de la rentrée littéraire, ce livre mérite amplement le prix qui lui a été attribué. L’œuvre de Jacques Henric mêle adroitement autobiographie, références littéraires et journal intime. Bien que la boxe soit le sujet principal du récit, l’auteur évoque la violence, la mort, la peur, le racisme et se pose de nombreuses questions qui font également réfléchir le lecteur. L’écrivain y alterne les anecdotes sur les champions, les histoires et les légendes de ce monde,  mais il aborde également la déchéance des champions, l’alcool et la drogue. Une plongée dans un univers fascinant.

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