«L'Assemblée des animaux»

Filelfo, une fable animalière pour une écologie imaginative

Filelfo, un mystérieux écrivain italien, livre une fable animalière qui plonge ses racines dans la culture antique. Dans L’Assemblée des animaux (Arthaud), il met en scène avec maestria la gronde des animaux contre l’exploitation de la terre par les êtres humains. Une comédie rafraîchissante pour un propos glaçant.

Filelfo, un mystérieux écrivain italien, livre une fable animalière qui plonge ses racines dans la culture antique. Dans L’Assemblée des animaux, il met en scène avec maestria la gronde des animaux contre l’exploitation de la terre par les êtres humains. Sous des airs de comédie rafraîchissante ou de fable fans la lignée de La Fontaine, le propos fait frémir le lecteur.  Et si la Terre n'avait pas dit son dernier mot contre les hommes ?

Une fiction inspirée des confinements

Filelfo est le pseudonyme d’un écrivain italien. Dans L’Assemblée des animaux, la nature reprend ses droits à travers une mise en scène pleine de maestria. Cette comédie douce-amère pétrie de références antiques est l’un de ses nombreuses fictions inspirées des confinements. La conscience des injustices faites à la Terre et de ses revanches possibles a fait alors son chemin dans les esprits.

Filelfo est allé plus loin dans la réflexion que ses contemporains. Sans doute parce qu’il ajoute à son talent de conteur et la force de sa révolte contre les excès de la modernité, une vaste culture antique, biblique et philosophique. Son imagination également dépasse allègrement celle de nombre de professionnels de la plume.

L’anthropomorphisme est une recette ancienne. Elle est toujours efficace, pourvu qu’on la manie avec subtilité. C’est une sorte d’arche de Noé du bord du gouffre que convoque le mystérieux écrivain italien. Filelfo préserve en effet son identité en refusant la publication de toute photographie. Chaque espèce prend tour à tour à la parole dans cette parodie d’Assemblée des Nations Unies à la fois rafraîchissante et grinçante.

Il faut se figurer un charivari de girafes, de souris et d’aigles. Des pandas, des koalas, et des grizzly réunis pour écouter parler la baleine. Des discours couverts par des applaudissements d’élytres. Salués par la « fantasmagorie » des papillons. Quelque chose d’à la fois grandiose et enfantin. Mais la vérité sort justement de la bouche des enfants. Ou des animaux.

Une fable où la nature prend sa revanche

Rafraîchissante car le regard des animaux est salutaire pour évoquer la « loi naturelle ». L’instinct. Le bien commun. Elle est indispensable pour leur donner corps avec justesse. Après tout, qui sont les êtres humains pour en parler. Déconnecté qu’ils sont de leur corps, sinon de leur intuition, en tous cas de leur cadre de vie originel le plus souvent.

Rafraîchissante encore parce que la nature est la mieux placée pour donner de la voix. Et rappeler l’homme à ses devoirs de respects les plus élémentaires. Le remettre à sa place.

« (…) le monde possède une seule âme, faite de tout ce dont nous autres, animaux, sommes, comme le dit notre nom, le miroir »

 

Les abeilles, par exemple, irrésistibles, lui rappellent la pensée d’Origène. Qu’« (…) il y a une parenté entre la terre et le ciel, la psyché et la chair, le corps et l’esprit, et que notre univers se règle selon leurs liens. Que la nature compose un seul et unique système, fait de connexions infinies et méticuleuses, et que le monde possède une seule âme, faite de tout ce dont nous autres, animaux, sommes, comme le dit notre nom, le miroir ». Puissant.

Ce changement de point de vue – décentrage diront-on aujourd’hui – est en soi un bol d’air tant l’anthropocentrisme fait des ravages. Hormis chez les antispécistes et autres ayatollahs verts, je vous l’accorde.

Grinçante car les animaux doivent décider lors de ce symposium si oui ou non, ils feront la guerre aux êtres humains. Or, quel meilleur moment que celui où les hommes se sont encagés eux-mêmes ? Victimes de leur insatiable appétit. De leur passion pour la distraction. D’un sujet grave, le fabuliste tire une comédie qui donne à son message toute la force de l’image.

L’écologie doit-elle être drôle ? Les solutions sont-elles radicales ? Il le semble en effet à en croire les philosophes (Pablo Servigne) qui épaulent les scientifiques (Jean-Marc Jancovici, Aurélien Barrau, Philippe Bihouix…) dans leur cri d’alerte pour sauver la planète. Imagée pourquoi pas ?

« Le destin des hommes et celui des animaux sont identiques. Les uns meurent, les autres aussi ».

 

Au commencement était la parole. Alors pourquoi ne pas la rendre à la nature elle-même ?

L’aigle le rappelle lui-même : « Nous aurons tous le même sort. Le destin des hommes et celui des animaux sont identiques. Les uns meurent, les autres aussi. L’homme n’a aucune supériorité sur les bêtes. »

C’est un peu de poésie, beaucoup d’humilité et moultes références – renvoyées en fin d’ouvrage – que met en œuvre l’auteur pour tenter d’échapper au cauchemar écologique qui hante les coeurs. À l’urgence climatique qui sème la panique.

À la culpabilité sourde qui mine les esprits. De quoi ? De vivre avec les moyens modernes dont nous ne pouvons plus non passer ! ?

Un appel d’air, et une forme de tendresse, dont on ne veut plus se passer.

> L’Assemblée des animaux, de Filelfo, Arthaud, 195 pages, 16 euros.

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