Tous les extraits

Sarah, Susanne et l’écrivain

Sarah lui demanda comment il imaginait Susanne Stadler, puisque c’était le nom qu’il lui avait choisi. Qui est cette femme, finalement ? lui demanda-t-elle. Il lui répondit qu’elle avait le même âge qu’elle, quarante- quatre ans au moment des faits, il n’avait pas modifié la date de naissance. Elle était brune et grande elle aussi, mariée et mère de deux enfants, Luigi et Paloma, de dix-sept et vingt et un ans. Les vrais prénoms, comme elle le lui avait demandé, n’avaient pas été conservés. Il avait également changé la ville. Susanne Stadler habitait Dijon. Elle lui...
L'amour

L'amour

La première fois que Jeanne voit Pietro, c’est au gymnase où sa mère fait le ménage. Quand c’est le jour de nettoyer les gradins, la mère embarque sa fille, on n’aura pas trop de quatre bras. Jeanne y gagne 20 francs, ça fait un petit complément à sa paye de l’hôtel. Et puis ça l’occupe. Un mercredi de février, leurs horaires coïncident ave l’entraînement de l’équipe de basket. Les semelles de caoutchouc crissent sur le parquet, les shorts en nylon luisent sous les projecteurs. Il est là en débardeur rouge, ses cheveux noirs mi-longs ceints d’un bandeau...
A ma soeur et unique

A ma sœur et unique

Le 3 janvier 1889 au matin, les yeux encore rougis des lectures, des écrits ou des insomnies de la nuit, la tête entre enclume et marteau tant ses incessants maux de tête sont de puissance vulcanale, le corps vêtu de ce costume sans couleur et sans fibres à force d’être usé, les pieds chaussés de ces brodequins lui permettant ses trois à huit heures de marche quotidienne au cours desquelles il glorifie ou invective nuages et paysages selon que son esprit est d’humeur badine ou chafouine, ainsi défait, ainsi vêtu, tant souverain que déjeté, il descend l’escalier de la...
Comédie d'automne (Littérature Française)

Comédie d'automne

Ses manières courtoises, un peu surannées, détonnaient dans le quartier populaire de la rue de Flandre. Jamais il ne saluait une femme sans ôter sa casquette de tweed, ni l’hiver ne serrait une main sans retirer son gant. Il s’effaçait toujours au moment d’entrer sous l’auvent du kiosque si quelqu’un se présentait en même temps que lui, et d’un geste du bras cédait volontiers son tour. De même proposait-il spontanément ses services pour se saisir d’une revue glissée dans un casier haut perché, que réclamait un client aux bras trop courts, évitant au vendeur de...
Le grand feu

Le grand feu

C’est au petit matin du 31 mai 1699 qu’Ilaria naît. La sixième de la fratrie à pointer son minuscule corps, parfaitement formé, doigts, orteils, jambes et bras, ventre et organes, tout y est, chevelure et crâne bombé. Francesca est assise sur un grand fauteuil, bassine et linges attendent leur heure. Elle connaît la douleur, la patience éprouvée, l’étau qui se serre et se desserre, la soif et le vertige. Il fait chaud déjà, humide à Venise, après une semaine d’averses inexpliquées. Cette pluie augure d’une naissance heureuse, lui a-t-on dit. Un signe d’eau...
Perspective(s)

Perspective(s)

1. Maria de Médicis à Catherine de Médicis, reine de France Florence, 1er janvier 1557 S’il savait que je vous écris, mon père me tuerait. Mais comment refuser une faveur si innocente à votre altesse ? Il est mon père, mais n’êtes-vous pas ma tante ? Que me font, à moi, vos querelles, et votre Strozzi, et votre politique ? À la vérité, votre lettre m’a causé une joie que vous ne pouvez concevoir. Quoi ? La reine de France me supplie de l’entretenir sur sa ville natale, en échange de son amitié ? Quel plus...
L'enragé

L'enragé

La Teigne, 11 octobre 1932 ous sont tête basse, le nez dans leur écuelle à chien. Ils bouffent, ils lapent, ils saucent leur pâtée sans un bruit. Interdit à table, le bruit. Le réfectoire doit être silencieux. — Silencieux, c’est compris ? a balancé Chautemps pour impressionner les nouveaux. Sauf à la récréation, la moindre parole est punie. Le surveillant-chef empêche même les regards. — Je lis dans vos yeux, bandits. Cet ancien sous-officier marche entre les tables, boudiné dans son uniforme bleu. — J’y vois les sales tours...
Croix de cendre

Croix de Cendre

Languedoc. Monas...
Le Côté de Guermantes: ( À la recherche du temps perdu - Tome 3 )

A la recherche du temps perdu : Le côté de Guermantes

Mme de Guermantes s'avança décidément vers la voiture et redit un dernier adieu à Swann. «Vous savez, nous reparlerons de cela, je ne crois pas un mot de ce que vous dites, mais il faut en parler ensemble. On vous aura bêtement effrayé, venez déjeuner, le jour que vous voudrez (pour Mme de Guermantes tout se résolvait toujours en déjeuners), vous me direz votre jour et votre heure», et relevant sa jupe rouge elle posa son pied sur le marchepied. Elle allait entrer en voiture, quand, voyant ce pied, le duc s'écria d'une voix terrible: «Oriane, qu'est-ce que vous alliez faire,...
Partir 66° Nord: Chroniques d'une apprentie capitaine

Partir 66° Nord

On dirait qu’une tornade est passée sur Aurora. Le sol est couvert de miettes et de papiers froissés. Les coffres sont ouverts. Des outils, des canettes et des boîtes de biscuits traînent partout. Les cabines passagers sont en vrac, la moquette bleue pleine de plumes (les duvets et les doudounes des clients en laissent partout), de cheveux, de débris. Quand il retrouve la parole après son second café, le skipper, amical mais comme lassé d’avance, lâche : « Pour apprendre à connaître un bateau, la meilleure manière, c’est de le nettoyer de fond en comble....
Lettre d'une inconnue

Lettre d'une inconnue

Mon enfant est mort hier. Trois jours et trois nuits durant, j'ai lutté avec la mort pour sauver cette tendre petite vie ; quarante heures durant, alors que la grippe secouait de fièvre son pauvre corps, je suis restée à le veiller. J'ai appliqué des linges frais sur son front ardent ; nuit et jour j'ai tenu ses petites mains fébriles dans les miennes. Au troisième soir, je me suis effondrée. Mes yeux n'en pouvaient plus, ils se fermaient sans que je m'en rende compte. J'ai dormi trois, peut-être quatre heures sur un mauvais fauteuil, et la mort en a profité pour s'emparer de lui....
Eloge de la vieillesse

Eloge de la vieillesse

Dans ce jardin de la vieillesse s'épanouissent les fleurs que nous aurions à peine songé cultiver autrefois. Ici fleurit la patience, une fleur noble. Nous devenons paisibles, tolérants, et plus notre désir d'intervenir, d'agir diminue, plus nous voyons croître notre capacité à observer, à écouter la nature aussi bien que les hommes. Nous laissons leur existence se développer devant nous sans éprouver aucune volonté critique, avec un étonnement toujours renouvelé face à leur diversité. Parfois nous ressentons de l'intérêt et un regret silencieux, parfois nous rions avec un...
Louis-Ferdinand Céline. Bagatelles pour un massacre.

Bagatelles pour un massacre

Gutman il ruisselle d'idées. Voici l'intermédiaire génial... Il a réfléchi... - Tu n'es pas poète des fois, dis donc ? par hasard ?... qu'il me demande à brûle-pourpoint. - Tu me prends sans vert... (Je ne m'étais jamais à moi-même posé la question.) Poète ? que je dis... Poète ?... Poète comme M. Mallarmé ? Tristan Derème, Valéry, l'Exposition ? Victor Hugo ? Guernesey ? Waterloo ? Les Gorges du Gard ? Saint-Malo ? M. Lifar ?... Comme tout le Frente Popular ? Comme M. Bloch ? Maurice Rostand ? Poète enfin ?... - Oui ! Poète enfin ! - Hum... Hum... C'est bien difficile à...
Le Portrait de Dorian Gray (Classiques t. 569)

Le portrait de Dorian Gray

Non, vous ne le croyez pas encore. Un jour, lorsque vous serez vieux, flétri, laid, lorsque la pensée aura creusé ses rides sur votre front, que les jeux horribles de la passion auront brûlé vos lèvres, alors vous le comprendrez, vous le sentirez cruellement. Maintenant, où que vous alliez, vous enchantez le monde. En sera-t-il toujours ainsi ?... Vous avez un visage merveilleusement beau, M. Gray. Ne protestez pas. C'est la vérité. Et la beauté est une forme de génie, elle est même supérieure au génie, puisqu'elle se passe d'explication. Elle est une des grandes merveilles du...
ET SI ...

Et si...

Debout, figée, je me sens comme aspirée par ce trou. Vais-je y tomber ? Pourrais-je y sauter ? Hébétée, ma rose à la main, je tremble. Le sol tourne sous mes pieds. Dans mon dos, je sens tous ces regards : peinés, curieux, témoins de l’impensable, inquiets aussi. Ils me portent, mais ils m’agressent, comme tout, en ce jour funeste. Tout me poignarde. Je meurs avec elle. Encore plus en arrière se dresse la petite chapelle romane que nous venons de quitter. Je sais que la croix s’élève bien haut, et même sans la voir, elle m’attire à elle, me donne le...
MAUVAIS GARÇON Guide de survie pour les cancres

Mauvais garçon - Guide de survie pour les cancres

Je pense avoir eu une belle enfance. Je n’ai manqué de rien, ni d’amour, ni d’amis, ni de copains mais peut-être de la présence d’un père. Notre mère s’est bien occupée de nous, et je lui en suis reconnaissant. Somme toute, j’ai grandi avec mes forces et mes faiblesses. À l’adolescence, cela a été une autre paire de manches. Par exemple, sur le plan scolaire, j’ai été un piètre collégien. Toujours au fond de la classe, proche du radiateur. Nul en orthographe et en grammaire, un cancre en mathé­matiques. En résumé, une catastrophe ambulante. Je suis inscrit...
Fuir les mots

Fuir les mots

Un crayon à la main, Claire a envie de griffonner ce qui lui passe par la tête. Et pour commencer, tous ces mots en M  : mentir, malade, médecin, merdique, mort, mortalités, murs, monstres, maison, métamorphose, matrice, mer, montagne, monde…Mathilde. Les aligner ces mots, qu’ils émergent, qu’ils disent, qu’ils s’éclatent.
Fuir les mots

Fuir les mots

Concernant son départ, il n’y a rien à dire. L’arrivée des mots, prématurés, risque d’ériger des digues. Toute tentative pour décrire, circonscrire, rassurer, colmaterait la brèche avant même de l’avoir inventoriée. Une certitude s’impose. Garder le silence. Fuir les mots, ceux qui vous capturent et vous emprisonnent comme un lasso.
Sido

Sido

D’autres jours, je me vois poussée hors de moi-même et forcée de concéder une large hospitalité à ceux qui, m’ayant cédé leur place sur la terre, ne se sont qu’en apparence immergés dans la mort. L’onde de fureur qui monte en moi et me gouverne comme un plaisir des sens : voilà mon père, sa blanche main italienne tendue vers les lames, refermée sur le poignard à ressort qui ne le quittait pas. Mon père encore, la jalousie qui me rendit, autrefois, si incommode… Docilement, je remets mes pas dans la trace des pas, à jamais arrêtés, qui marquaient leur chemin du...
Là où chante la colline

Extrait de là où chante la colline

Moi qui ne pleurais qu'en de rares occasions, je venais de puiser dans mon stock de perles de chagrin...

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