«Parce que la vie est ainsi»

Seb O. Giroux-Earl : quand le viol devient métamorphose

Sébastien Olivier Giroux aborde dans son premier roman, Parce que la vie est ainsiun sujet difficile : le viol. Sous le nom de plume Seb O. Giroux-Earl, l'auteur nous conte la vie d'Emily, qui va, pour se reconstruire, concentrer son énergie à se libérer de sa mémoire. Un texte qui déroute et transporte en même temps, qui a déjà séduit plusiers milliers de lecteurs grâce au bouche à oreille. Rencontre avec un jeune auteur en quête de résilience. 

Seb O. Giroux-Earl appartient à ces nouveaux auteurs qui émergent de la toile et savent se faire repérer très vite. Son premier roman, «Parce que la vie est ainsi», a déjà séduit plusieurs milliers de lecteurs après s'être fait remarquer au sein du réseau Mon Best Seller, alors que son sujet ose aborder le thème de la reconstruction d'une vie de femme après un viol. Rencontre avec un auteur qui sait manier l'art du récit efficace. 

Viabooks : Votre nom de plume est Seb O. Giroux-Earl. Comment avez-vous choisi ce pseudonyme? 

Seb O. Giroux-Earl : Mon nom réel est Sébastien Olivier Giroux. J’ai ajouté le nom de ma femme : Earl, en hommage au soutien qu’elle m’apporte.

Est-ce votre premier roman et comment vous est venue l’envie d’écrire?

S.O.G.-E. :  Oui, il s'agit de mon premier roman. Beaucoup de gens disent qu'ils ont un livre en eux... mais ils ne le sortent jamais. Je rêvais d'être écrivain depuis très jeune, mais il m'a fallu longtemps avant de me sentir tel. Je crois qu'il y a une maturité pour la création et elle n'a pas d’âge. Mais pour écrire, cela dépend vraiment de beaucoup de choses. 
Pour moi, c'est un cumul d'évènements qui m’y a amené. Depuis plusieurs années je travaille à mon compte en Angleterre. Une vie difficile : je n'ai aucune protection sociale, pas de retraite et je ne travaille par contrat, donc tout peut s'arrêter du jour au lendemain. Je crois que cela m'a aidé à développer une confiance en moi, et à renforcer ma propre résilience.
Puis j'ai perdu mon père il y a un peu plus de 2 ans et ça a aussi été un cap, un tournant. Une sorte d'appel d'air. J'ai réalisé que je ne pourrais plus le rendre fier, mais au lieu d'abandonner mes rêves, ça les a galvanisés. Comme si je devais prouver au moins à moi-même et à ma famille de ce que je pouvais faire. Finalement, un décès vous fait prendre conscience du temps qui passe. 
Et enfin, j'ai rencontré ma femme. Je ne sais pas si j'aurais jamais écrit sans elle, Elle a réellement su stimuler mon passage à l’acte d’écriture. Je lui rends hommage en adoptant son nom à la suite du mien : Earl.

Parce que la vie est ainsi : pourquoi ce « parce que » dans le titre…? 

S.O.G.-E. : Ce titre a un côté fataliste qui m'intéresse parce qu’il dit l’a difficulté à contrôler sa vie. Certains évènements se produisent malgré nous. C'est comme ça. Mais on peut réagir et réordonner notre vie à leur suite. Ce qui importe, c’est de concentrer son énergie sur ce que l'on peut changer, et qui ne dépend que de nous. C’est ce que l’héroïne, Emily, va comprendre.

Votre livre témoigne d'une maîtrise du processus d'écriture. Vous êtes-vous fait accompagner au long de votre projet?

S.O.G.-E. : Oui. Je ne suis pas un expert, mon orthographe est terrible. J’ai eu le plaisir de travailler avec Laurent Bettoni, qui, il y a quelques années avait accompagné Agnès Martin-Lugand. Son aide m’a été précieuse, non seulement sur la correction orthographique, mais bien sûr le développement de mon histoire.

Pouvez-vous présenter aux lecteurs de Viabooks le fil conducteur de votre roman? 

 S.O.G.-E. : Il y a 8 ans, Emily, une jeune Londonienne a été victime d'une agression sexuelle en rentrant d'une soirée entre amies. Cette nuit fatidique a complètement bouleversé sa vie. Depuis, elle habite chez ses parents. On la retrouve aujourd'hui toujours en proie à ses démons intérieurs. Avec le support de sa meilleure amie, elle essaye de sortir de sa torpeur pour enfin « renaitre ».
Elle va déménager, rencontrer des hommes, se lancer dans une relation… et puis au travers tous ces changements elle va se découvrir. Ses choix vont éclairer ses souhaits et enfin elle va comprendre ce qu’elle veut. La boucle se terminera avec cette sérénité retrouvée et laissera la porte grande ouverte à la suite de sa vie… que choisira-t-elle ? L'un des romans de ces dernières années qui m'ont beaucoup inspiré est Les gens heureux lisent et boivent du café d’Agnès Martin-Lugand. Cette histoire finalement assez simple d'une femme qui doit se remettre de son deuil m'a porté. Je voulais écrire une histoire de résilience, de retour à la vie après une perte intense.

Vous osez évoquer le viol comme une renaissance. Une approche peu conventionnelle dans notre époque très victimisante...

S.O.G.-E. : Mon roman traite d'un sujet délicat. Depuis un an et demi, je travaille au sein d'une organisation Britannique dont le but est de comprendre et réduire les abus sexuels dont sont victimes les enfants. Je suis en contact permanent avec des avocats et des psychologues. J'ai également accès très fréquemment à des témoignages de victimes. Tout cela me plonge dans cet univers sombre. J'ai lu et entendu énormément de témoignages de victimes et cela m'a aidé à modeler mes personnages ; je suis aussi entouré de psychologues spécialistes pour valider certains comportements. 
En outre, j'ai le souvenir d'expériences personnelles avec des victimes de viol. J'ai été exposé à des accès de colères, d’abandon.
De tous ces témoignages, de cette multitude d’expérience, j’ai voulu présenter le côté le plus optimiste. Un viol change la vie. Il existe autant de manières que de personnes de poursuivre sa vie après une agression. Pour beaucoup, l’agression est comme une forme de demi-mort, la vie telle qu’elle était n’existe plus vraiment. Pour d’autres une deuxième vie s’invite. C’est cet espoir que je veux raconter.

Finalement le thème central de votre livre n'est-il pas celui de la reconstruction d’une vie? 

S.O.G.-E. : Vie perdue ou mal vécue : l’un des génies méconnus de ce thème est Henrik Ibsen, l’auteur dramaturge de Peer Gynt. La plupart de ses héros ne vivent pas la vie qu'ils voudraient réellement, mais sont soumis et asservis aux  obligations religieuses, familiales ou sociales. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui vivent cette situation sans le savoir.
Mon histoire est celle d'une jeune femme qui réalise que sa vie n'est pas ce qu'elle aurait voulu et qui trouve une certaine force pour y remédier.

En toile de fond se dessine aussi la rupture des générations. Tension entre mère et fille, parents et enfants...

S.O.G.-E. : La vie mal-vécue, est composée de plein d’autres choses. Emily se trouve au cœur de ce que les Anglais appellent « perfect storm », la tempête du siècle. Non seulement elle doit vivre avec son monstre, cette colère intérieure liée à l’agression, mais elle est également confrontée à des difficultés professionnelles, à des choix personnels, à une amie qui ébranle ses certitudes et enfin aux exigences sociales que sa mère incarne.
C’est en partie ce que de nombreux jeunes gens vivent aujourd’hui. Le monde s’est accéléré ; les aventures sentimentales commencent souvent en lignes; les entreprises évoluent de manière globale sans se soucier des employés locaux et tout n’est que compétition, même le logement.
Ma toile de fond n’est rien d’autres que la société moderne dans sa frénésie.

La jalousie est centrale dans le personnage d’Emilie. Au point de susciter parfois l'exaspération chez le lecteur… Pourquoi cette volonté?

S.O.G.-E. : Ce n’est pas une jalousie ordinaire, ce n’est pas tant une volonté d’avoir ce que les autres possèdent, pour Emily qu’une projection personnelle de ce qu’elle pourrait avoir, de ce qu’elle pourrait être si elle se laissait aller. Lorsqu’elle se libère et se rapproche enfin de la vie qu’elle souhaite, elle revient même sur certaines décisions parce qu’elle est en charge de sa vie. Cette jalousie, ce mal-être viennent de ces manques.

Vous avez recours à de nombreux dialogues … Quel rôle jouent-ils dans l'écriture ?

S.O.G.-E. : Les dialogues jouent plusieurs rôles. Ils portent l’action, ils l’accélèrent parfois. Ils mais aussi ils restent ouverts. Chacun peut identifier son personnage préféré et peut-être même s’identifier à lui ou elle. Les interactions entre personnages m’intéressent. J’aimerais écrire pour le théâtre !

Il y a aussi une dimension féministe dans votre roman... 

S.O.G.-E. : Emily est une féministe. Elle est indépendante et combat les préjugés habituels. Ce qui lui arrive alors qu'elle est encore jeune la rend très déterminée, en même temps elle développe cette force et cette résilience. C'est important je crois de montrer qu'aujourd'hui tout le monde devrait avoir le droit de vivre, comme ils ou elles le souhaitent, sans crainte de préjugés.

D'où vous est venue l'idée du dossier documentaire final? 

S.O.G.-E. : Je voulais apporter quelques précisions. Ce que j'ai appris par mon travail et la recherche pour ce roman, c'est que le nombre de victimes de viol est considérable ! Mais beaucoup de gens l'ignorent. Je trouve important d’informer le lecteur. Un roman est avant tout lié au plaisir de la lecture, mais j’ai ajouté pour ceux qui le souhaitent quelques pages d’un dossier documentaire.  Si une victime d’agression, après avoir lu mon histoire et les documents, en venait à trouver le courage d'appeler à l'aide, c’est mon but. Et de nombreux coupables arrivent à s'abriter pendant des années, comptant sur le silence de leurs victimes.

>Pour en savoir plus sur le livre, découvrez le site de l'auteur 

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