«Les Bourgeois»

Alice Ferney et les ombres discrètes de la bourgeoisie

« J’ai essayé de retrouver l’esprit du temps, pas de juger le temps avec l’esprit d’aujourd’hui. ». C'est ce que  déclare  Alice Ferney, dont le dernier livre Les Bourgeois  revient sur le destin d'une famille qui traverse le sicècle tout en restant sous le couvercle de ses  traditions.  Nous avons rencontré cette auteure, invitée du Festival Livres en tête le vendredi  24 novembre, qui sait débusquer les secrets intimes et démasquer les apparences.

Dans son dernier roman, Les Bourgeois, Alice Ferney retrace la trajectoire d'une famille française dont les membres, bourgeois par leurs mœurs autant que par leur nom, se trouvent aux prises avec les grands événements du XXe siècle. Dans cette grande fresque familiale, les générations se succèdent, prennent part à la grande histoire, et disparaissent dans l'inaltérable valse du temps.

Viabooks : Pouvez-vous résumer votre livre en trois mots ?

Alice Ferney : Le temps, la mort, la famille.

Quels bourgeois préférez-vous ?

A.F. : J’aime les bourgeois éclairés, pas sectaires, ni avides et globalement intelligents. Je trouve que l’intelligence sauve de tout, même de sa condition sociale qu’on ne choisit finalement jamais.

Vous êtes-vous inspirée d’une œuvre classique ?

A.F. : Non, au contraire il y avait un petit contre-pied, parce que c’est vrai que la figure du bourgeois a été assassinée. Le bourgeois d’emblée est mauvais, ridicule, mesquin, que ce soit chez Flaubert, Druon… J’avais bien le sentiment que j’écrivais sur les bourgeois dans un sens très premier du terme, c’est-à-dire des gens qui ne sont ni des prolétaires, ni des aristocrates. Je ne trouvais pas que c’était déterminant dans leur façon d’être, justement je n’avais pas un regard de sociologue. Je n’ai pas écrit des types, j’ai parlé de gens et j’avais bien le sentiment que c’était un contrepied au modèle habituel. Il n’y a pas de livres sur les bourgeois qui m’ont servi de modèles, je les ai lu justement et j’ai vu que je ne faisais pas pareil. J’ai beaucoup pensé au livre d’Annie Arnaud Les années, dont j’avais beaucoup aimé l’écriture et le projet et je me suis rendu compte qu’il y avait des choses communes finalement. Ensuite, ce qui a été beaucoup plus fou, c’est une lecture que j’ai faite alors que mon livre était fini, rendu et même lu, un livre de Daniel Mendelsohn Les Disparus, qui m’a complètement bouleversée. Cela ne parle pas de la même chose, mais dans le projet fondamental : revenir sur l’histoire de gens qui sont morts, c’est un livre qui m’a beaucoup frappée. C’est un livre pour lequel je me suis dit que j’aurais été beaucoup plus audacieuse si je l’avais lu avant d’écrire mon roman.

Vous avez parlé des prolétaires et aristocrates, auriez-vous pu écrire un livre sur les ouvriers?

A.F. : Oui bien sûr, d’ailleurs je l’ai fait il y a longtemps sur une famille de gitans. Ça m’avait valu beaucoup d’angoisses, puisque je ne venais pas d’un milieu de gitan ou de pauvres. Pour ce roman (Les Bourgeois) je me sens tout à fait autorisée, alors que parler de gens qui vivent des souffrances que je n’ai jamais connues, c’était plus compliqué. Mais on peut le faire. Je pense que le grand intérêt d’être romancier est d‘augmenter sa vie par l’écriture, de faire des expériences que l’on n’a pas vécues et de les vivre en les écrivant. Je pense que l’on peut écrire sur des choses que l’on ne connaît pas.

Naît-on bourgeois ou le devient-on ?

A.F. : Je pense que, comme le dit la chanson, on ne choisit pas où l’on naît. Bourdieu a bien montré à quel point c’est un héritage et quelque chose que l’on reçoit. Ensuite, ce n’est pas que l’on devient, c’est qu’on naît dans un milieu bourgeois et on s’émancipe ou pas. C’est le mot qui m’intéresse en particulier : émancipation. S’émanciper ça veut dire penser librement et non pas répéter la pensée du milieu dans lequel on vit. A ce titre, on peut devenir bourgeois. Si je me souviens bien, c’est le reproche que Sartre a fait très violemment à Camus après la publication de L’homme révolté. J’ai lu cet été la trilogie d’Elena Ferrante, une expression arrive quand la petite Leila épouse l’épicier et devient riche, on dit d’elle qu’elle “fait sa bourgeoise”. Cela signale aussi une sorte de rêve, celui de devenir aisé comme un bourgeois sans en avoir les défauts. On espère toujours conserver un niveau de bien-être et de richesse qu’on a connu et on espère ne pas être étriqué, avide, sectaire comme on peut le reprocher parfois aux grands bourgeois. Quand on dit les bourgeois on passe à côté de toute une vérité. Entre la petite bourgeoisie intellectuelle qui a longtemps constitué le vivier de l’éducation nationale et la grande bourgeoisie fortunée, il y a un monde.

Pourquoi avoir choisi Les Bourgeois comme titre ?

A.F. : Le titre était une sorte de pirouette. J’ai placé mon livre dans ce milieu-là, mais l’intérêt de mon livre est beaucoup plus la grande traversée du temps du siècle. Il se trouve que je la fais avec des bourgeois. Ne trouvant pas un titre qui me plaisait avec le concept de temps, j’ai pris les Bourgeois.

Jules, un des membre de la famille Bourgeois, “s'embourgeoise” en vieillissant. Pensez-vous que l’on puisse être jeune et bourgeois ?

A.F. : Oui, on est bourgeois très tôt. Cela me frappe parfois de voir certains enfants répéter très tôt les idées de leurs parents qui sont des idées bourgeoises. Au contraire, on vit bourgeoisement si on a les parents qui vivent bourgeoisement. On s’encanaille, on se libère, on se rebelle. Mai 68 c’était ça, c’était une rébellion des bourgeois.

On voit évoluer cette grande famille dans les années 20-40, comment la décririez-vous?

A.F. : Pour moi c’est une famille nombreuse, catholique, parisienne (ça me semble assez important). Je pense que cela suffit pour la caractériser. Le catholicisme est important. Le fait qu’elle soit nombreuse n’est pas révélateur du milieu qu’elle représente. Je me suis rendue compte comme dans les années 20-30, la France manque d’enfants et la population a une perception très immédiate des effets du deuil de 14, tous les milieux font beaucoup d’enfants. C’est aussi une famille qui me paraît très représentative de la France de cette époque.

Est-elle si différente de la famille d’aujourd’hui ?

A.F. : Oui, clairement, je ne connais plus de familles comme ça. Ce n’est pas une famille moderne avec la femme qui reste à la maison pour s’occuper de dix enfants. Vous vous imaginez élever dix enfants aujourd’hui ? C’est très représentatif d’une certaine époque.

Est-ce que vous vous êtes imaginée à la place de Mathilde par exemple ?

A.F. : Non je l’ai fait par un exercice d’empathie, j’ai choisi une vie complètement différente. De toute façon je pense que c’est un livre sur un temps radicalement différent du nôtre et ce n’est pas possible de prendre ces personnes comme modèle ou d’imaginer vivre comme elles. Et puis, cela n’a pas du tout le même sens, une femme qui refuserait de travailler par exemple et qui resterait chez elle, ce serait un drôle de choix par rapport à l’immensité des possibles. À l’époque, cela ne correspondait pas du tout à la même chose qu’aujourd’hui. D’abord ce n’était pas un choix, il n’y avait pas la contraception. Toutes les infrastructures poussaient à ce genre de vie. Rien n’est comparable. J’ai essayé de retrouver l’esprit du temps, pas de juger le temps avec l’esprit d’aujourd’hui. Je vois aussi qu’avoir dix enfants, ce n’est pas rien, cela peut aussi apporter une satisfaction. Je dis à un moment que c’est une œuvre, moi personnellement ce n’est pas ce que j’ai choisi de faire.

Parler de cette famille est-ce un prétexte pour parler de la guerre omniprésente dans le récit?

A.F. : Non, j’ai pensé à cette génération née entre 20 et 40 et j’ai réalisé qu’elle s’éteint aujourd’hui, mais elle a traversé le siècle entier puisque les historiens font même débuter le XXème siècle en 1914. Ces gens ont vu une transformation du monde, un embrasement du monde aussi et je me disais que c’était extraordinaire d’avoir vécu tout cela. Je me demandais comment on vivait et comment on survivait à certaines des choses qui se sont produites. J’ai eu envie de refaire la traversée, de m’imaginer à côté d’eux dans cette traversée de l’histoire qui au moment où elle est vécue n’est pas l’histoire. C’est le présent. Effectivement, une des choses que j’ai réalisée, c’est que le XXème siècle a été pour les femmes le siècle de l’émancipation et pour les hommes le siècle de guerre et j’ai eu envie d’en parler.

La religion est la valeur dominante de la famille Bourgeois. Quelle serait la valeur bourgeoise actuelle ?

A.F. : C’est bien de remarquer que c’est la dernière génération qui vit dans une France avec une forte pratique religieuse. C’est un milieu qui a été très marqué par la séparation de l’Église et de l’État. Comme ils continuent de mettre en pratique les valeurs catholiques et chrétiennes, ils ont la nostalgie de l’union du pouvoir politique et  spirituel. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, la France est le pays le plus athé du monde, je dirais que ce qui a pris sa place serait peut-être les droits de l’homme, un certain humanisme. La question est de savoir si c’est profond ou pas. Je pense à la critique sociale qui est présente dans le film qui a eu la palme d’or à Cannes : The Square. Cela pose vraiment cette question, c’est-à-dire qu’en surface on fait très attention à l’autre mais dans le concret de la vie ce n’est pas certain. Les réactions sont même stupéfiantes dans le film. J’espère et je pense d’ailleurs que dans ce milieu le christianisme tend vers cela. Il y a surement une bourgeoisie d’affaire ou l’argent est très important. Il y a certainement une opposition aujourd’hui entre la bourgeoisie intellectuelle et la bourgeoisie d’affaire. Les deux sont d’ailleurs moquées.

On remarque deux lignes directrices : une chronologique avec des dates et événements historiques précis et une autre plus spatiale avec cette idée d’évolution dans le temps, notamment par les photos, y-a-t-il une dimension plus temporelle ou visuelle ?

A.F. : Tout le monde me parle de cet album photographique, mais dans mon esprit il n’y en a pas. J’évoque une ou deux fois une photo. Pour moi, la ligne est vraiment temporelle. Quand j’ai eu l’idée d’écrire la vie de ces 10 personnes pendant 100 ans, tant que je n’ai pas eu l’idée de sélectionner certains moments qui étaient ou importants dans l’histoire nationale ou dans l’histoire de cette famille, je n’ai pas commencé.  Pour moi, c’est ce qui commande tout le livre. La narratrice extérieure a cette fonction de réfléchir aux transformations des regards et des pensées en fonction de l’époque où l’on se tient. Elle sert à parler aux lecteurs de ce qu’aujourd’hui nous savons et que les gens de l’époque ne savaient pas. Les dates sont pour moi le fil de la narration, elles sont mêlées car je voulais conserver une logique de narration et on peut sauter d’une date à une autre en fonction des personnages, des événements, des pensées et des questions que l’on se pose. Pour faire des parallèles entre présent et passé puisque parfois le passé a l’air de revenir.

Pensez-vous que la lecture est une activité bourgeoise ?

A.F. : Oui ça l’a été, cela m’a fait penser à un livre formidable d’un critique irlandais  qui s’appelait Connolly, publié en Angleterre en 1936 et qui s’appelle : Ce qu’il faut faire pour ne plus être écrivain, et étudie l’évolution de l’écriture et de la littérature en fonction de l’évolution de la société. Il a cette remarque qui me paraît très vraie, nous sommes passés d’un style complexe élaboré, qu’il appelle “style mandarin” à ce que Hemingway appelle le “style quotidien”, une écriture plus simple avec des mots moins rares, des phrases moins alambiquées, avec moins d’incises. Autrefois, les livres étaient lus par des rentiers lettrés qui avaient tout leur temps pour se plonger dans Henry James, Virginia Woolf, alors que maintenant les gens travaillent tous les jours et ne peuvent pas lire. Ils ont peu de temps et sont plus pressés. La lecture a été longtemps un privilège des bourgeois. C’est drôle, je finis la lecture de l’autobiographie de Simone Veil, et elle demande à son père si cela l’aurait dérangé qu’elle n’épouse pas un juif, ce à quoi il répond : “pour ma part, si je n’avais pas épousé une juive, j’aurais épousé une aristocrate car ce sont les seuls qui savent lire depuis des siècles.” J’ai trouvé cette réponse très originale. Maintenant c’est faux, je ne connais pas les statistiques sur la lecture en fonction des milieux sociaux, mais je pense que chez les bourgeois aisés elle (la lecture) se perd tout autant qu’ailleurs à cause des écrans et de l’informatique. Cela devient une activité extrêmement intime, personnelle, une révolte, un refus d’être pris dans la technicité. C’est de plus en plus intéressant, les gens qui lisent se recrutent dans tous les milieux et sont marqués par cette liberté de se mettre en retrait et de rester seuls pour lire.

Un livre vous a donné le goût de la lecture ?

A.F. : Enfant, j’ai été une très mauvaise lectrice, j’ai lu assez peu et ma mère me disait souvent que je ne lisais pas assez. Je me suis mise à lire à 15-16 ans, j’ai un déficit des livres que l’on peut lire entre 12-15 ans. Ensuite, j’ai dévoré tout le temps, j’ai le souvenir du premier auteur dont la langue a suscité de l’admiration : c’est Montherlant. J’ai souvenir d’avoir été bouleversée par le récit de la mort du mari dans le livre d’Anne Philipe, Le temps d’un soupir. Ce sont des lectures très éclectiques.

Dans quelles conditions aimez-vous lire ?

A.F. : J’aime beaucoup lire dehors. Une des choses que je n’aime pas dans la lecture, c’est qu’on est enfermé. Lire dehors c’est prendre l’air et se cultiver. Ensuite, ce qui est précieux c’est d’avoir une longue plage de temps, c’est-à-dire, ne pas être interrompu. De ce point de vue, j’aime lire pendant les vacances. En plus pour quelqu’un qui écrit, lire est à la fois travailler mais ce n’est pas travailler. Beaucoup de gens trouvent que lire est difficile, pour moi, lire c’est plus facile qu’écrire. Souvent je suis obligée de m’empêcher de lire car quand je n’écris pas, je lis et quand je lis je n’écris pas. Donc il faut que je me calme.

La lecture en une émotion ?

A.F. : Ce serait l’absorption, pour moi la lecture c’est s’absorber ailleurs, cela vous plonge dans le livre.

Votre livre en un genre musical ou un son ?

A.F. : Non car malheureusement je n’entends pas mon écriture, j’entends qu’elle me plait ou pas mais je n’entends pas ce qu’elle est.

Un son ou un bruit qui vous inspire ?

A.F. : J’écoute de la musique constamment quand j’écris. J’ai écouté Maria callas pendant tout le temps où j’écrivais le livre. J’aime beaucoup la voix, les voix, j’aime l’opéra et la voix humaine, c’est presque ce qui m’émeut le plus.

Entendez-vous la voix de vos personnages ?

A.F. : Oui j’entends si cela sonne ou pas. J’entends si ce personnage peut parler comme ça ou pas. J’entends si la phrase de narration est bonne et a quelque chose qui correspond à ce que j’apprécie. Ce n’est jamais autant que ce que je voudrais. Parfois, je me dis que si j’écrivais les livres que je voulais, je n’aurais pas de lecteurs car j’aime quand c’est très touffu. Mais quand je corrige, j’allège beaucoup. Je crois qu’Hemingway disait qu’un “écrivain sans oreilles est comme un boxeur sans main gauche”.

Aimez-vous entendre votre voix ?

A.F. : Non pas du tout, mais comme lorsqu’on vieillit, on gagne en sagesse, on s’accepte d’avantage. Maintenant j’accepte d’avoir cette voix très particulière. Mais je ne l’aime pas du tout.

Avez-vous un gueuloir comme Flaubert ?

A.F. : Non pas du tout, justement car j’entends à l’intérieur. Cela peut m’arriver de lire à voix haute pour affiner la ponctuation et s’assurer que le lecteur pourra le lire mais ce n’est pas obligé de le faire. Il y a des grands styles ou c’est très difficile, ce n’est pas grave.

Que choisissez-vous entre perdre l’usage de la parole ou l’ouïe ?

A.F. : Comme j’admire beaucoup les gens qui écoutent et moins les gens qui parlent beaucoup, je me dis autant choisir de perdre la parole.

La lecture à haute voix en un mot ?

A.F. : Partage, je pense à quelque chose de collectif. J’ai beaucoup pratiqué la lecture à voix haute avec mes enfants. Je me souviens que l’on se mettait l’un à côté de l’autre et on lisait chacun une page à voix haute. Pour moi, c’était la manière de partager les mots car sinon la lecture silencieuse est solitaire, cela me renvoie principalement au partage.

Pensez-vous que le lecteur est un bon lecteur de ses textes ?

A.F. : Non, alors personnellement je déteste. Je sais que certains auteurs lisent très bien, on m’a déjà parlé de Christine Angot qui lit magnifiquement ses textes, et je peux comprendre. Mais personnellement, je déteste lire, d’abord si on n’aime pas sa voix, on n’a pas forcément envie que ce soit cette voix qui porte son texte et ensuite, cela renvoie une impression de vanité que je n’aime pas. Une fois qu’un livre est fini, je prends mes distances et je n’y pense plus, je n’y reviens pas. Je pense que c’est plus intéressant d’avoir une interprétation extérieure. Cela m’intéresse plus que d’imposer encore mon rythme, mon ton... Je refuse toujours de lire mes livres.

Quelles seraient les caractéristiques du lecteur idéal ?

A.F. : Chez Les Livreurs, j’aime beaucoup la tonicité, comme c’est un spectacle, il y a une vraie vitalité dans la manière de lire et j’apprécie énormément cela. J’apprécie justement le fait d’imprimer un relief au texte, de le faire sonner et de ne pas le lire de manière monocorde, je n’aime pas cette idée de quelque chose de plat.

Quelle erreur craignez-vous que l’on commette en lisant votre texte à haute voix?

A.F. : Aucune, cela me fait penser qu’il y a une autre chose que j’apprécie, c’est la rapidité. Je n’aime pas du tout quand on s’attarde, avec gravité comme s’il s’agissait d’un chef d’œuvre. J’aime bien justement qu’on aille dans le texte parce si le texte est fort, il n’y a pas de force à rajouter, pour moi le lecteur à voix haute s’appuie sur le texte. Je n’aurais pas de crainte dans le sens ou cela ferait juste un massacre à voix haute. Il m’arrive d’aller dans des endroits où un lecteur amateur lit très mal, évidemment ça me fait un peu mal au cœur. Je me dis parfois que pour le dessin, le piano personne ne se dirait: “ tiens je vais devenir pianiste, ou peintre“ car il y a une technicité. Les gens croient tous qu’ils savent écrire, et ils savent écrire de fait, mais savent-ils écrire une œuvre d’art ? Il y a une différence entre écrire tout court et écrire dans le sens artistique du mot. La lecture c’est pareil, il y a plein de gens qui savent lire, mais qui ne savent pas lire à voix haute. Je considère que je ne sais pas lire à voix haute dans le sens de partager un texte. Je fais cette expérience d’être lue par des gens qui ne sont pas plus que moi des bons lecteurs, cela fait que le texte malgré tout est un peu abîmé, tant pis ce n’est pas grave, cela ne change pas le texte. C’est quand même l’intérêt du livre, c’est un objet imprimé. Le risque est que celui qui a entendu la lecture n’aura pas envie de lire le livre, ce n’est pas grave.

Que pensez-vous du fait d’associer lecture et fête ?

A.F. : Depuis le début, je suis totalement enjouée, ravie et émerveillée par ce que font Les Livreurs. Justement parce qu’on dit souvent que la lecture chez les jeunes est associée aux cours et qu’ils n’ont pas envie de lire. Cela leur montre à quel point on peut rigoler en lisant des textes ou même des grands classiques ou bien être bouleversés par la qualité. Ce qui est intéressant c’est sentir tout ce que l’on peut faire avec des mots. Les grands auteurs font quelque chose dont on n’avait pas idée, dans la poésie, dans la musicalité, dans la profondeur. Lire à un jeune un texte de Proust, c’est isoler une pépite pour la lui montrer car sinon il est éventuellement découragé devant l’ampleur de l’oeuvre et cela va peut-être être le stimulus pour qu’il commence à s’y plonger.

Propos recueillis Fanny Boutinet et Marie-Sophie Simon pour Les Livreurs.

Informations pratiques

>Cliquer sur ce lien pour réserver une place pour la soirée du vendredi 24 novembre à laquelle participera Alice Ferney
>Lire notre article sur le Festival "Livres en tête 2017
>Accéder au programme complet du festival Livres en tête qui  se tient du  20 au 29 novembre 2017 à Paris

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