L'Odyssée

Extrait de L'Odyssée de Homère

Alors survint l'âme du Thébain Tirésias, le sceptre d'or en main. Il me reconnut et me dit: «Descendant de Zeus, fils de Laërte, Ulysse aux mille expédients, » pourquoi donc, malheureux, quittant la lumière du soleil, es-tu venu voir les morts et la région sans joie? Mais éloigne-toi de la fosse, écarte la pointe de ton épée, que je boive du sang et te dise la vérité. » Il parlait ainsi; moi, je m'éloignai et remis au fourreau mon épée aux clous d'argent. Quand il eut bu le sang noir, l'irréprochable devin m'adressa ces paroles: « C’est le retour doux comme le miel que tu cherches, glorieux Ulysse ; mais un dieu te le rendra pénible ; car l'Ébranleur de la terre ne te laissera point passer, je pense; il a conçu en son cœur de la rancune contre toi ; il t'en veut d’avoir ôté la vue à son cher fils. Mais, malgré sa colère, vous pourriez encore, au prix d'épreuves, arriver chez vous, si tu veux contenir ton cœur et celui de tes compagnons, dès l’instant où tu approcheras ton vaisseau bien charpenté de l’île du Trident, après avoir échappé à la mer violette, quand vous y trouverez au pacage les vaches et les robustes moutons d'Hélios, qui voit tout et entend tout. Si tu ne leur fais aucun mal, si tu penses à votre retour, vous pourrez encore, non sans souffrir, atteindre Ithaque ; mais si tu les endommages, alors je te prédis la perte de ton vaisseau et de tes compagnons ; et toi, si tu échappes au trépas, tu rentreras tard, en triste état, après avoir perdu tous tes compagnons, sur un vaisseau étranger ; tu trouveras en ta maison de quoi te peiner ; des hommes arrogants, qui dévorent ton bien, en prétendant à ta noble femme et lui offrant des présents de noces. »

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