A livre ouvert, In "Leurs larmes chantent, parfois".

"   La pluie  frappe contre les vitres, une pluie d’hiver.
    Trainées éclatées, prismes changeants…
    Elle suit les arabesques en apnée, a mal à la tête : mal sa vie, mal son cœur   –mal dormi !
    Il fait sombre dehors, froid sûrement, et personne   ne l’attend : personne d’important, personne qui tremble à ses retards, à ses silences, à ses soupirs. Elle possède pourtant cette beauté rare qui attire les regards sans jamais les heurter, de longs cheveux  châtain où s’accroche la lumière,  des joues bien dessinées. Son père lui a laissé un nez  légèrement aquilin et un teint gentiment mordoré, sa grand-mère maternelle lui a transmis des yeux très bleus, des yeux d’océan.

    Levée avant l’heure, les paupières lourdes des heures perdues…
    Là, penchée vers le miroir grossissant, elle dépose un soupçon de fard à tricher et de bleu à rêver   –se redresse, se jauge, se juge, grimace.
    Un début de journée comme tant d’autres.
    La trentaine assurée, c’est une jeune femme élégante et forte comme on en croise dans les villes, de celles qui ont en commun la solitude  souterraine des vies agitées, des jours trop longs trop courts et des rues où tous se bousculent sans plus vraiment se voir.
    Le boulot, les allers-retours, les emmerdes : rouspétances et embouteillages !
    Surtout, pas d’homme, plus d’amants, pas d’enfant   –et une lassitude soudaine qui lui donne aisément cinq ans de plus, une sacrée claque quand elle se laisse surprendre par son goujat de miroir.
    Hier elle s’est effondrée devant son café réchauffé et sa télé éteinte, des larmes qu’elle ne pouvait pas arrêter, pas expliquer (...) ", page 37

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jacqueline Wautier

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