Hommage

Harper Lee, symbole éternel de la lutte contre le racisme

Chaque enfant américain a déjà entendu parler de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, l’oeuvre de Harper Lee vendue à plus de trente millions d’exemplaires. On l’étudie à l’école, on en regarde l’adaptation au cinéma, bref, impossible de passer à côté. Sa disparition intervient quelques mois après la parution de son dernier roman, Va et poste une sentinelle. 

Succès instantané d’un livre d’actualité

L’histoire de Scout, une jeune fille de 8 ans dans l’Alabama des années 1930, a fait vendre près de 40 millions de copies de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur à travers le monde. Un succès qui propulse son auteure, Harper Lee, au devant de la scène littéraire et lui fait obtenir le tant convoité prix Pulitzer en 1961. « Notre livre national », l’avait qualifié la star de la télévision américaine Oprah Winfrey. Lorsque Harper Lee publie son livre en 1960, a révolution est déjà en marche aux États-Unis. L’année marque par exemple le premier « sit-in » d’étudiants noirs en Caroline du Nord, mais aussi la création du Ku Klux Klan. Le racisme est donc un sujet brûlant, et c’est précisément celui dont Harper Lee a décidé de parler. 

To Kill a Mockingbird, titre originel du livre, connait un succès rare en librairie, dès sa sortie. L’histoire se situe à Maycomb, Alabama, dans les années 1930, théâtre de la ségrégation au coeur d’une Amérique sudiste raciste et emplie de préjugés. Une histoire racontée par Scout, jeune fille de 8 ans, qui refuse avec vigueur le racisme ambiant. Quand son père, l’avocat Atticus Finch, accepte de défendre un homme noir accusé du viol d’une femme blanche, son destin va radicalement changer. Un destin qui rappelle d’ailleurs celui de l’auteur puisque Harper Lee est elle-même originaire de l’Alabama, elle qui est née et a fini sa vie à Monroeville. 

Un livre aux aspects autobiographiques

Si le livre n’est pas une autobiographie, il présente néanmoins de nombreuses similitudes avec la vie de son auteure. Plusieurs personnages sont ainsi inspirés de son enfance, notamment Finch, qui est avocat tout comme le père de Lee, qui a lui-même défendu deux hommes noirs accusés de meurtre. Le personnage de Dill est quant à lui inspiré de l’ami d’enfance de l’écrivaine, qui n’était autre que Truman Capote. Originaires de la même ville, l’auteur de Diamants sur canapé va beaucoup encourager Lee dans l’écriture. Celle-ci va lui être une grande aide pour son roman De sang-froid. Harper Lee va l’aider dans ses recherches, l’accompagner dans ses voyages, l’encourager… Capote va alors lui dédier le roman. Comme quoi, l’entraide et l’inspiration entre écrivains est primordiale. 

Silence médiatique

Après l’incroyable succès de ce premier roman, Harper Lee va entrer dans un silence de cinquante cinq ans. Elle devient la femme d’un seul livre, d’un inédit, comme si le succès écrasant de son premier ouvrage était déjà trop. Quelques articles et essais paraîtront sous sa signature, notamment dans le magazine Vogue, mais sa discrétion médiatique reste de taille. Lee ne donne plus d’interviews depuis 1964… Et pourtant les rumeurs fusent. On parle d’un nouveau livre, ou de plusieurs romans non publiés, ou encore d’ouvrages parus sous pseudonyme. C’est finalement à la surprise générale qu’est annoncée la sortie d’un nouveau roman, qui a pour titre Go set a watchman, en janvier 2015. 


Une suite controversée

Le roman, écrit dans les années 1950 mais jusqu’à présent jamais publié, reprend la même héroïne que le premier, Scout. Le manuscrit aurait été redécouvert par la nouvelle avocate de l’auteur dans un coffre-fort, à côté de celui du premier roman. L’ouvrage, paru à l’été 2015, fait polémique, et l’on se demande si Harper Lee, affaiblie par un AVC en 2007 et par la mort de sa soeur, a vraiment eu son mot à dire quand à sa publication, cinquante-cinq après le premier. 

Va et poste une sentinelle (Grasset), la suite du roman mythique s’écoule par cartons dans les librairies. Pas surprenant puisqu’Amazon le décrit comme le livre le plus pré-commandé depuis le dernier tome de Harry Potter. Situé vingt ans après le premier roman, voilà qu’on découvre qu’Atticus Finch, qu’on pensait être un héros, est en fait raciste. Pas du tout celui qu’on pensait. Les Américains sont déçus, ne veulent pas croire à la destitution de leur symbole pieux et intègre. On parle de mauvais roman, d’incohérence et même de plagiat. Scout, elle, a désormais 26 ans et cherche à s’émanciper. Si le roman tourne toujours autour du racisme, il s’intéresse désormais davantage à la relation père-fille et à l’émancipation de la femme, ainsi qu’au mariage. Si le roman se vend particulièrement, les critiques sont très généralement négatives. Avec près de 1,6 million d’exemplaires écoulés, c’est le roman le plus vendu aux Etats-Unis en 2015, selon l’institut Nielsen.

Harper Lee retourne alors dans la discrétion de sa maison de retraite à Monroeville où elle va finir ses jours, et s’éteindre le 19 février à l’âge de 89 ans. Mais son oeuvre est loin de s’éteindre avec elle. Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur reste toujours, soixante ans plus tard, un succès de la littérature américaine, un roman mythique qu’on n’est pas prêt d’arrêter de lire, d’étudier, d’analyser, ni d’admirer.  

En savoir plus

>Découvrez un extrait de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur : 

>Lire un extrait de Va et poste une sentinelle
 
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